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Situation post électorale : Mgr Paul LONTSIE KEUNE évêque de Bafoussam au peuple de Dieu le 29 juillet dernier

  • Photo du rédacteur: Steve simplice Nouguen
    Steve simplice Nouguen
  • 5 août
  • 6 min de lecture
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«Le peuple murmure... nous nous interrogeons»

Message de Monseigneur Paul LONTSIE-KEUNE au peuple de Dieu qui est à Bafoussam et aux personnes de bonne volonté

La clameur du peuple camerounais est montée vers Dieu (cf. Ex 3,9) et est parvenue jusqu'à nous, nous qui observons au quotidien la scène sociopolitique de notre beau et grand pays le Cameroun. Ce cri du peuple qui déchire le silence et perce tous les bruits qui cherchent à l'étouffer, se fait davantage entendre au cours de ces dernières années qui nous conduisent à l'élection présidentielle annoncée pour le 12 octobre prochain.


Nous avons été attentifs aux débats passionnés portant sur la possibilité pour les uns et les autres de porter, selon les exigences de la loi, leur candidature pour briguer la magistrature suprême, qui est la plus haute fonction à laquelle tout citoyen camerounais peut légitimement aspirer. Ces débats suscités et provoqués sur le « mandat impératif» et le «mandat représentatif» avaient-ils pour objectif de disqualifier certains candidats ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.

Dans la perspective de cette élection présidentielle à venir, nous avons noté le report des élections municipales et législatives initialement prévues en mars 2025 et qui auront finalement lieu, s'il n'y a pas un autre glissement, après l'élection présidentielle. Ce report était-il motivé par des calculs à des fins politiciennes et stratégiques ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.


Nous avons enregistré 83 candidatures à l'élection présidentielle prochaine. Ce nombre record est-il le signe de vitalité démocratique? Révèle-t-il une banalisation de la fonction présidentielle ou plutôt le désir que nourrit une largefrange des citoyens camerounais pour l'alternance et le changement ? Dans notre grand et beau pays le Cameroun si avancé comme nous savons le dire en démocratie, le mot alternance devrait-il faire peur ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.

Nous avons écouté attentivement le samedi 26 juillet 2025, la proclamation par ELECAM de la liste des 13 candidats retenus provisoirement pour concourir à cette élection présidentielle. Nous avons noté qu'en cette matinée du 26 juillet, les forces de l'ordre et de sécurité avaient envahi les grands carrefours de certaines de nos grandes villes. Redoutait-on une réaction du peuple ? La Vérité et la Justice ont elles besoin de la force des armes pour s'imposer à tous ou pour se protéger ? Notre Maître et Seigneur qui est chemin, vérité et vie (Jn 14, 6) ne dit-il pas que la vérité nous rendra libres (Jn 8,32) ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.


Nous avons noté avant et après la convocation du corps électoral plusieurs recours et plaintes introduits par certains candidats et acteurs de la société civile auprès d’ELECAM, du Conseil Constitutionnel et des tribunaux par rapport à la non-publication de la liste électorale nationale. Ces recours ont connu un rejet systématique ou une déclaration d'incompétence de la plus haute juridiction de notre pays pourtant chargée de la constitutionnalité des lois et du contrôle de la régularité du processus électoral. Ces revendications étaient-elles contraires aux dispositions du code électoral ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.

Nous avons observé toutes les restrictions systématiques des libertés publiques reconnues aux citoyens et aux partis politiques, ainsi qu'au rétrécissement de l'espace public. Ces comportements assortis de menaces, d'intimidations et d'interdictions traduisent-ils une certaine fébrilité démocratique ou une volonté de réduire le peuple au silence ? Le peuple murmure... nous nous interrogeons.

Nous avons aussi noté une explosion continue du tribalisme et des discours haineux dans les débats télévisés et les médias sociaux, qui divisent davantage les Camerounais.

Le fait de donner l'impression de relativiser un tel état de fait signifierait-il que l'on veut donner raison à l'adage diabolique selon lequel « il faut diviser pour mieux régner » ?


Le peuple murmure... nous nous interrogeons.

Au regard de tout ce qui vient d'être dit sans exhaustivité, nous estimons que tous ces comportements et ces événements qui se déroulent à la veille de l'élection présidentielle ne favorisent pas la paix. Et pourtant tous ont le mot paix dans la/bouche et sur les lèvres, tant des citoyens vraiment épris de paix que des fauteurs insoupçonnés de trouble.

Nous disons qu'aucune paix durable et véritable ne peut advenir avec le mensonge, la manipulation, les intimidations, la peur, le déni du droit, l'injustice, la corruption, l'achat des consciences, l'instrumentalisation du droit et son interprétation à géométrie variable pour des fins politiciennes.


Nous proclamons que la paix durable se construit sur des fondations solides et fortifiées d'un véritable Etat de droit que sont la justice et la vérité. L'injustice ne peut jamais apporter la paix ; la fraude électorale ne peut jamais apporter la paix; le non-droit ne peut jamais apporter la paix; la peur ne peut jamais apporter la paix; l'absence d'alternance prépare le lit des conflits futurs et non de la paix. Osons le dire avec l'Ecclésiaste, « Il y a un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux » (Eccl. 3,1), puisque par essence, comme le dit aussi fort à propos Claude Lefort: « Le lieu du pouvoir apparaît comme un lieu vide, et ceux qui l'exercent ne peuvent s'y maintenir qu'à condition de se soumettre à la règle du jeu démocratique, c'est-à-dire d'admettre qu'ils ne sont là que provisoirement »'.

« Oui, il faut le dire, l'alternance en démocratie est un très grand bien pour une nation car elle permet le renouvellement pacifique du pouvoir, empêche la confiscation du pouvoir par un seul groupe, renforce la légitimité des institutions, stimule la responsabilité des gouvernants et donne aux citoyens le sentiment d'être véritablement souverains.


Maintenant que le contentieux pré-électoral va bientôt commencer, nous en appelons à la vérité et à la liberté de conscience des membres du Conseil Constitutionnel et à leur sens de responsabilité devant le peuple camerounais, devant l'histoire et devant Dieu, qui est le Juge suprême. Nous les appelons à ne dire que le droit et rien que le droit, à rendre justice et rien que la justice; loin de toute influence politique, administrative et partisane, par fidélité au serment qu'ils ont prêté, de telle sorte que le peuple ait vraiment la nette impression que la justice a été effectivement rendue, et comme le dirait Lord Hewart : « La justice ne doit pas seulement être faite, elle doit aussi être vue comme étant faite ». Nous disons que c'est aussi ainsi que la paix régnera dans notre pays, et avec le psalmiste nous proclamons: « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s'embrassent »

(Psaume 85,11).

Nous voulons la paix, mais pas n'importe quelle paix, la paix dans le droit, la justice, la vérité, la lumière et l'amour (cf. 1 Co 13). « Tant que la raison du plus fort sera la meilleure et que celui qui gueule plus fort aura nécessairement raison », tant que dans notre beau pays le Cameroun, il y aura une société à deux vitesses, tant qu'il y aura deux poids et deux mesures, tant que tout cela et bien d'autres encore existeront, tant que le droit de la force prendra le pas sur la force du droit, le peuple continuera de murmurer et nous nous interrogerons.

Tant qu'il y aura une société à deux justices, on aura beau parler de paix, prier pour la paix, plaider pour la paix, ce ne sera que mensonge, comédie, hypocrisie et duplicité.


Le peuple continuera de murmurer et nous nous interrogerons.

Donne-nous Seigneur Notre Dieu de ne point avoir peur de hurler à la face de ce diocèse que Tu nous as confié pour le plus grand bien de ton Peuple et au nom de ceux qui ne peuvent pas hurler. Donne-nous de crier, de pleurer pour ceux qui ne peuvent ni pleurer ni crier et dont le cri est étouffé par le bruit et la voix des puissants de ce monde. Que Ton règne vienne Seigneur sur notre terre, et qu'advienne un monde plus beau et plus fraternel pour lequel tu es venu, tu es mort et ressuscité pour que nous ayons la vie. Donne-nous la paix. Amen.

Je vous accorde de grand cœur ma bénédiction apostolique »Dixit Mgr paul Lontsie keune

Notre secours est dans le Nom du Seigneur : réponse des fidèles : Qui a fait le ciel et la terre.

Homélie prononcée à Bafoussam, ce 29 juillet 2025 lors de la fête des saints Lazare, Marthe et Marie.

 

Clément Noumsi

 
 
 

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